[Carabus (Chrysocarabus) hispanus] : questions !

Insectes à élytres, les scarabées, coccinelles, charançons, carabes, etc. forment l'ordre le plus diversifié au monde.

Animateur : Lysbeth d'Alys

Avatar du membre
jules d'oc
Membre confirmé
Enregistré le : dimanche 24 juin 2007, 18:08
Localisation : BEZIERS

[Carabus (Chrysocarabus) hispanus] : questions !

Message par jules d'oc »

A la lecture du post ouvert par Kÿmox Visu et concernant les magnifiques hybrides naturels rutilans x hispanus j'ai appris que FE ne retenait aucune ssp.pour hispanus,il y a lieu de la sorte de s'interroger sur le pourquoi et en toute connaissance des travaux d'auteurs spécialisés en la matière;pour ma part j'en étais resté à l'iconographie de J.Darnaud et al.(1983) séparant bien les lignées issues des foyers provençal et languedocien.Donc si j'ai bien compris les 3 sous-espèces définies par ces auteurs ne seraient plus valides et j'avoue que cela interpelle l'amateur que je suis;comment donc concilier les variations indéniables de cette espèce ? - les exemplaires du Nord de l'Hérault semblent différer de ceux de Lozère que je connais bien et de ce fait doivent tous être rattachés à une seule et même entité...et il y a bien de quoi s'y perdre;les hispanus de Lozère ne seraient-t-ils plus un produit de métissage entre des lignées différentes,compte-tenu du fait qu'ils sont morphologiquement moins homogènes que les autres ? Ainsi le Carabe espagnol de Fabricius (1792) garde encore un côté mystérieux,ne serait-ce que par l'épithète,bien que la provenance d'Ispaniac (ou Ispagnac) ne semble plus faire de doutes;et pour le toponyme j'ai retrouvé quelque part l'orthographe Hispaniac,ce qui expliquerait la confusion originelle.Dans les vallées du Lot et du Tarn les lieux en -ac sont communs et découlent selon les linguistes de la colonisation gallo-romaine : Ispaniac signifiant Domaine ou Villa d'un notable nommé Hispanus...et pardon pour ce détour historique qui peut à la rigueur intéresser l'un de nous.Et pour revenir sur le sujet je vous livre représentation d'une femelle fugitive découverte en loge sous épais tapis de mousses,le cliché originel en argentique n'est pas parfait mais tête et thorax sont bien bleus...

Image

jules d\'oc : France : 17 4 2004 : Le Monastier-Pin-Moriès : 48

altitude : 800 m - taille : 30 mm

ref:29904

Balises :
Avatar du membre
Saturnin de la Poire
Ron-ron
Enregistré le : mercredi 11 mai 2005, 14:34
Localisation : Troupomey-Les-Deux-Eglises

Message par Saturnin de la Poire »

Marc l'a fort justement rappelé, cette conception de la sous-espèce unique de l'hispanus provient des analyses génétiques effectuées par Deuve. ce qui tend à dire que les différences morphologiques observées sont soit l'expression phénotypique spectaculaire de variations génétiques mineures (un exemple connu de tous : les races de chien. La différence entre un saint bernard et un chiuawa sont énormes visuellement, mais on peine à les expliquer génétiquement !!! C'est d'ailleurs pour cela que ce sont toujours des "races" - au sens "élevage", soit scientifiquement pas grand chose si ce n'est des moyennes phénotypiques au vu d'un standard de sélection. Ca porte un nom bien particulier je crois, mais je ne m'en souviens plus. Véto !!! t'es où ??? - et pas des sous-espèces), soit l'expression génétique de la réponse à un environnement particulier, ce qui peut concorder avec cette histoire de lignées, qui pourraient en fait traduire l'existence de l'espèce dans deux grands types écologiques différents créant ainsi deux grandes lignées phénotypiques différentes.

Tout le problème de s'appuyer pour cela sur un effet d'optique (les reflets métalliques - un effet de réfraction, en fait. je vous renvois aux expériences dites de la "fente de Young") qui sont une expression exacerbée par notre oeil d'une varaiation ultra-microscopique de l'ornementation de la cuticule
Sat'

Si vous pouvez lire ça, c'est que vous êtes trop près
le géorgien
Membre
Enregistré le : lundi 12 août 2019, 20:37
Localisation : Lys Lez Lannoy

Message par le géorgien »

Saturnin de la Poire a écrit :Marc l'a fort justement rappelé, cette conception de la sous-espèce unique de l'hispanus provient des analyses génétiques effectuées par Deuve. ce qui tend à dire que les différences morphologiques observées sont soit l'expression phénotypique spectaculaire de variations génétiques mineures (un exemple connu de tous : les races de chien. La différence entre un saint bernard et un chiuawa sont énormes visuellement, mais on peine à les expliquer génétiquement !!!
Juste attention cher Sat' de ne pas comparer des races de chiens (qui ne sont pas des ssp.) avec des bêtes "sauvages", avec des "populations" bien distinctes ! 8-O Je comprends ce que tu veux dire là mais ça peut être mal interprété...

C'est vrai que c'est déroutant, ceux qui connaissent bien hispanus peuvent facilement distinguer deux lignées distinctes : latissimus et dromensis (=boudeti), la troisième ssp. est très polymorphe et il y a des tas de passages entre l'une ou l'autre, et Sat' a raison sur ce point (enfin je pense), ce n'est là que l'expression de l'extrême variabilité de l'espèce...

mais comment alors expliquer que le "canui" s'hybride très mal avec les autres Chrysocarabus en élevage, contrairement aux bêtes de Charente, qui par ailleurs donnent des hybrides franchement verts, ce qui n'est pas le cas avec latissimus ?

Si on mélange une série de bêtes de la Drôme avec une des Corbières, je fais le pari qu'à 90 % je retrouve, sans étiquette, leur provenance...
Alors ssp. ou pas ? c'est vrai que chez hispanus, comme chez splendens, c'est assez délicat, j'avoue...
Avatar du membre
jules d'oc
Membre confirmé
Enregistré le : dimanche 24 juin 2007, 18:08
Localisation : BEZIERS

Message par jules d'oc »

Merci Sat' pour ta réponse et effectivement selon l'incidence de la lumière le rouge vermillon des élytres peut passer au verdâtre,ce qui démontre à l'évidence le facteur subjectif ! mes notions de génétique sont anciennes,pour ne pas dire rudimentaires,et ceci dit il est plus séduisant de parler de races que de sous-espèces;mais si nous admettons une transmission de caractères phénotypiques stables (à divers degrés certes),ils doivent bien se situer quelque part dans le génome car dans le cas contraire tous les individus se ressembleraient...en tout cas cela simplifie le problème et règle un variétisme excessif,et le problème de ces hispanus n'est pas le plus ardu;lorsque des analyses génétiques approfondies seront conduites pour bon nombre de nos coléos,alors il est probable que nos ouvrages ne feront plus état de ssp. diverses où l'on ne se retrouve souvent qu'avec de sérieuses difficultés en l'absence de critères morphologiques avérés.Alors hispanus héraultais ou lozériens n'en jetez plus,vous appartenez à la même fratrie ,et désormais votre systématique en sera simplifiée ! ...
Avatar du membre
jules d'oc
Membre confirmé
Enregistré le : dimanche 24 juin 2007, 18:08
Localisation : BEZIERS

Message par jules d'oc »

En matière d'hybridisme et pour répondre à Kÿmox Visu je suis dans l'ignorance la plus absolue,reste possible que certains caractères phénotypiques puissent être considérés comme facteurs limitants lors de copulations interspécifiques...mais là j'avance dans la plus grande confusion.Pourquoi certains gènes récessifs ou d'autres dominants ne viendraient-ils pas influencer ou annihiler des croisements au sein d'espèces très proches,aux généticiens de nous dire si une telle interprétation a quelque chose de crédible (mais j'en doute fort!)...
Avatar du membre
jules d'oc
Membre confirmé
Enregistré le : dimanche 24 juin 2007, 18:08
Localisation : BEZIERS

Message par jules d'oc »

Et oubliant la génétique bien compliquée voici un autre C.hispanus lozérien à thorax bleu,découvert en loge hivernale en effondrant au piochon une motte de terre au pied d'un vieux chablis de Pin sylvestre (il s'agissait d'un mâle si mes souvenirs sont bons,de taille de peu inférieure à 30 mm!)...

Image

jules d\'oc : France : 2 4 1988 : Le Monastier-Pin-Moriès : 48

altitude : 800 m - taille : environ 30 mm

ref:29914
Avatar du membre
carabus
Membre
Enregistré le : samedi 30 septembre 2006, 13:13
Localisation : Nord

Message par carabus »

Saturnin de La Poire a écrit:
La différence entre un saint bernard et un chiuawa sont énormes visuellement, mais on peine à les expliquer génétiquement !!!
De manière assez générale, on peut dire que c’est lié à l’expression des gènes. C’est aussi pour ça que nous sommes aussi proches génétiquement (environ 99 %) des chimpanzés mais en même temps si différents d’aspect.

Saturnin de La Poire a écrit:
Tout le problème de s'appuyer pour cela sur un effet d'optique (les reflets métalliques - un effet de réfraction, en fait. je vous renvois aux expériences dites de la "fente de Young") qui sont une expression exacerbée par notre oeil d'une varaiation ultra-microscopique de l'ornementation de la cuticule
Pourquoi « exacerbé » ? Notre œil n’est qu’un récepteur et ne modifie pas le résultat des interférences lumineuses constructives ou destructives qui ont sélectionné une radiation (=couleur) à la sortie de la cuticule. Le système des fentes de Young n’est pas très adapté ici puisque, bien qu’il s’agisse en effet d’un dispositif interférentiel, il agit par transmission et non par réflexion comme pour les élytres d’un carabe. Par ailleurs, ces derniers constituent des systèmes multicouches d’un point de vue physique, et c’est autrement plus compliqué à aborder, d’un point de vue théorique, qu’un dispositif interférentiel simplifié à 2 éléments, équivalent aux fentes (il y en a 2) de Young. Un système de ce type provoque des interférences lumineuses mais est incapable d’isoler une teinte dans une direction donnée comme le fait un multicouche.
Avatar du membre
jules d'oc
Membre confirmé
Enregistré le : dimanche 24 juin 2007, 18:08
Localisation : BEZIERS

Message par jules d'oc »

Enfin et je ne voudrais pas abuser de votre patience à mon égard,mais il est une question à laquelle je souhaiterais une clarification : sur le terrain et in vivo nombre d'individus présentent un reflet vert très accusé,pouvant du reste évoquer une aberration chromatique déterminée par l'éclair du flash;mais cela apparait bien souvent hors photo et de tels individus mis en collection présentent des élytres très brillants et à reflets vert vif,unicolores et sans le rouge habituel qui tout de même pour d'autres se maintient lors de la déssication.Peut-on admettre devant ces exemplaires "aberrants chromatiques"quelque analogie avec la f.i.semivirescens mentionnée par J.Darnaud,cela fait des années que je m'interroge à leur sujet et à titre informatif je représente l'un de ces mâles ayant viré au vert,découvert sous écorce déhiscente de Pin sylvestre au niveau des contreforts de l'Aubrac Sud (Col du Trébatut,alt.1100m)...et il semblerait que le rouge résiduel sur l'un des élytres soit dans la réalité dominé par le vert ! ...

Image

jules d\'oc : France : 7 8 2001 : Saint-Germain-du-Teil : 48

altitude : 1100 m - taille : 30 mm

ref:29919
le géorgien
Membre
Enregistré le : lundi 12 août 2019, 20:37
Localisation : Lys Lez Lannoy

Message par le géorgien »

Il s'agit bien de ce que Darnaud appelait "semiverescens", j'ajouterai juste que je n'ai pas connaissance d'un élevage mené à terme de cette "forme", pour l'instant je resterai prudent : je ne sais pas s'il s'agit d'un accommodat ou belle et bien de l'expression d'un gène récessif...
je pencherai vers la deuxième solution en bon "carabologue" que je suis :lol:

dans le CRRom de Daniel il y a un hispanus "noir" et un autre "marron" dans le premier cas il s'agirait d'un accommodat, dans le second d'une "véritable forme" (génétique). restons donc prudent sur les "formes" hypochromatiques, d'autant plus qu'on reste dans le gamme de couleur "classique" de l'hispanus qui va du vert au rouge avec tous les intermédiaires... :wink:
Avatar du membre
carabus
Membre
Enregistré le : samedi 30 septembre 2006, 13:13
Localisation : Nord

Message par carabus »

Cette belle photo est très explicite en ce qui concerne la structure multicouche des élytres du carabe. L’avant apparaît rouge et l’arrière vert. Il s’agit tout simplement d’un décalage spectral (le spectre de la lumière blanche comprend toutes les radiations visibles qui vont du rouge au violet). La cause est la variation d’incidence entre l’avant et l’arrière des élytres, la photo étant prise de côté. La couleur privilégiée par les interférences constructives est alors le rouge pour l’avant et le vert pour l’arrière. On retrouve le même phénomène, mais amplifié (convexité de l’insecte) pour un Calosoma sycophanta.

Pourquoi ces insectes à reflet vert plus marqué que chez les autres hispanus virent-ils au vert franc après dessication ? Tout simplement parce que le séchage provoque une modification des couches de la cuticule et fait ainsi « glisser » le rouge à reflets verts vers le vert (désolé pour les répétitions) dans le spectre de la lumière blanche.

Physiquement, le système est bien connu (c’est un classique des interférences lumineuses) et nos chers insectes ne font ici qu’en donner une illustration naturelle. On peut effectivement associer à ce type d’hispanus la f.i. semivirescens de Darnaud mais de toute façon, cette nomenclature n’a pas de valeur taxonomique.

Retourner vers « Coléoptères »