Les araignées et le parasitisme
vendredi 16 janvier 2009
par macharivernanoz

Comme tous les êtres vivants, les araignées sont victimes de parasites. Parfois elles les sentiront à peine et parfois elles en mourront...

Qui sont ces parasites ? Quelles sont leurs tactiques et quels sont leurs buts ? Qui sont les victimes ?

Ces questions vont être abordées dans cet article. Au travers de définitions, d’exemples et d’illustrations nous pourrons prendre conscience de l’étendue du sujet, de sa complexité et des fabuleux mécanismes mis en place.

Cet article n’a pas de prétentions scientifiques. Il s’agit d’un travail de synthèse d’informations trouvées sur différents supports.

Marina CHAVERNOZ - 01/09

Quelques définitions pour permettre à tout le monde de partir du même pied. Ces définitions ne sont pas spécifiques aux arachnides, elles concernent l’ensemble des organismes vivants.

Tout d’abord, qu’est ce qu’un parasite ?

Eh bien, il s’agit d’un organisme vivant qui vit en partie ou totalement grâce à un autre organisme. L’organisme victime sera appelé l’hôte. Le parasitisme peut se faire aux dépens de l’hôte en allant jusqu’à entraîner sa mort. Le parasitisme peut aussi se faire sans provoquer la moindre perturbation pour l’hôte. Mais il peut encore se faire en symbiose, c’est à dire qu’il peut y avoir un bénéfice mutuel.

  • Lorsque le parasite entraine la mort de son hôte le terme à employer est parasitoïde. Certains vont même jusqu’à parler de prédation.
  • En cas de bénéfice mutuel, il s’agira de symbiose et le parasite sera un symbiote. Leur survie sera interdépendante.
  • Lorsque l’hôte ne subit aucun tort on parlera de commensalisme et de parasite commensal.

Devant les différents termes représentant différents parasites peuvent être rajoutés des préfixes. Il s’agit de pseudo, clepto, d’ecto, de méso et d’endo.

  • Un pseudoparasite vit aux dépens des œufs de son hôte.
  • Un cleptoparasite (ou kleptoparasite) vit aux dépens de la production d’un hôte (ex : une ruche parasitée...).
  • Un ectoparasite est présent sur les parties externes de son hôte. Il est donc visible.
  • Un mésoparasite est présent à l’intérieur de son hôte. Il est entré par des voies naturelles.
  • Et enfin, un endoparasite est présent à l’intérieur de son hôte sans être passé par des voies naturelles. C’est à dire qu’il y a eu perforation à un moment donné.

Les parasites se rencontrent à tous les stades de la vie d’un organisme : de l’œuf à l’imago.

Nos chères araignées subissent donc les assauts de tout un tas de parasites. Certains vont même jusqu’à manipuler le comportement de leur hôte.

Nous allons principalement rencontrer quatre cas de parasitisme différents :

Dans la grande majorité des cas, les parasites sont du type parasitoïde.


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Les pseudoparasites :

Sans le cas des araignées, les pseudoparasites parasitent les cocons. Le parasitisme des cocons est le plus simple à expliciter ! La survie du parasite dépend de sa capacité à pénétrer à l’intérieur du cocon afin de se repaître des réserves nutritionnelles que représentent les œufs et/ou les larves. Pour ce faire, celui-ci doit tout d’abord échapper à la surveillance de la mère et ensuite réussir à pénétrer dans la soie constituant le cocon. Ce parasite est soit une larve soit une femelle adulte qui veut pondre.

Le plus curieux est que la mère laisse souvent faire. Elle semble incapable de réagir voire de détecter le danger.

Les familles parasites de cocons ne sont pas très nombreuses.

Parmi les cas observés se trouve un Ichneumon du genre Tromatobia (Ichneumonidae, Hymenoptera) ). Ce genre est spécialisé dans le parasitisme d’araignées. Tromatobia ovivora est quant à elle spécialisée dans les cocons d’Argiope (Araneidae) .

Photo de Tromatobia sp.
Photo de Tromatobia sp.
Tromatobia sp.
Bel exemple d’une Tromatobia sp. en train de parasiter un cocon d’Argiope
Auteur : Franck Becquart

ref : 15671 - ref : 15672
Photos extraites d’une discussion sur le forum : hyménoptère parasitant un cocon d’argiope.

Les Ichneumon parasitant des cocons d’araignées sont assez nombreux. On peut aussi citer le genre Gelis qui s’attaque aussi bien à des Agroeca (Lycosidae) , qu’à des Linyphia (Linyphiidae) et à des Tetragnatha (Tetragnathidae) . Les Ichneumons pondent un grand nombre d’œufs dans un seul cocon mais, généralement pas plus de 5 parviennent à maturité.

La pensée première est que les larves d’Ichneumon mangent tous les œufs mais c’est très loin de la réalité ! Il a pu être observé que sur les espèces les plus vulnérables, seulement 50% des œufs sont détruits. Finalement, cela paraît logique : il faudra bien que la descendance des larves trouve des hôtes. Donc, pour trouver des hôtes, il suffit de ne pas tout détruire...

Il est très important pour la femelle Ichneumon de pondre dans un cocon au bon moment. Il ne faudra pas que la larve soit encore dans le coin au moment de l’éclosion des araignées ! Sinon, les rôles seront inversés.

En Inde, un hyménoptère chalcidien, Tachinobia repanda (Chalcididae, Hymenoptera) , parasite les cocons d’Argiope pulchella (Araneidae) .

Sont aussi connues des espèces de Mantispes (Neuroptera) dont les larves recherchent des cocons d’araignées. Plusieurs familles, à travers le monde, ont été répertoriées comme étant des hôtes de Mantispidae . Entre autres, il y a les Lycosidae , les Philodromidae , les Salticidae , les Anyphaenidae , les Theridiidae et les Agelenidae . Des cocons d’orbitèles parasités ont aussi été signalés.

Là aussi, on pourrait penser que la larve de Mantispe mange tous les œufs mais c’est, encore une fois, très loin de la réalité ! En fait, le taux de survie des œufs est assez élevé. Steven M. Roble, du Museum of Natural History and Department of Systematics and Ecology de l’université du Kansas, signale avoir trouvé 95 œufs survivants dans un cocon de Lycosa rabida parasité par Mantispa viridis.

Mantispa sp
Mantispa sp.
Auteur : Dimitri Geystor
ref : 11516

Les Mantispes ont deux techniques pour parasiter leur hôte : l’attaque de front et la ruse ! L’attaque frontale consiste en la perforation de la soie constituant le cocon. La ruse consiste quant à elle, à faire de « l’araignée-stop » ! C’est à dire que la larve va trouver une femelle, grimper sur son dos et se loger au niveau du pédicelle (jonction entre l’abdomen et le céphalothorax, inaccessible pour l’araignée). Ainsi, elle pourra s’incruster dès la création du cocon.

En attendant la création du cocon, la larve va pouvoir se nourrir de l’hémolymphe de l’araignée (elle sera alors un ectoparasite de l’araignée...) (Redborg KE. 1998).

La larve de Mantispe va muer une fois à l’intérieur du cocon. Les pattes disparaissent presque lors de cette mue. Une partie de son organe buccal s’est modifié pour pouvoir percer les œufs et aspirer la substance nutritive. La nymphose aura aussi lieu à l’intérieur du cocon mais l’émergence se fera à l’extérieur ! La nymphe est suffisamment mobile pour quitter le cocon juste avant l’émergence.

Quelques diptères parasitent eux aussi les cocons d’araignées.

En particulier les larves de diptère de la famille des Chloropidae (Diptera) . Par exemple, il y a les genres Speccafrons, Gaurax, Pseudogaurax, Siphonella et bien d’autres encore...

Le genre Pseudogaurax est connu pour parasiter les veuves noires (Theridiidae) aux État-Unis. Le femelle Pseudogaurax pond à l’intérieur du cocon alors que celui-ci n’est pas encore fini. Une fois le cocon fini, la larve pourra éclore et manger une partie des œufs. Cette fois-ci, une partie des œufs d’araignées est gardée intacte mais pas uniquement pour préserver la nourriture de la descendance. En effet, cette dernière est incapable de percer le cocon pour s’en extraire. Elle compte donc sur les jeunes araignées. Ces dernières ne mangeant pas encore (afin d’éviter le cannibalisme avant la dispersion), elle ne risque rien.

En Inde, Sarcophaga banksi, Sarcophagidae , parasite les cocons d’Argiope pulchella (Araneidae) . Aux États-Unis c’est Sarcophaga davidsoni qui est connu.

Parmi les familles suivantes se trouvent aussi des amatrices d’œufs d’araignées : Calliphoridae , Drosophilidae (un genre connu est endémique à Hawaï : Titanochaeta), Ephydridae (par exemple Trimerina madizans) et Phoridae .

Parmi les Phoridae, se trouve Phalacrotophora epeirae qui est connu pour parasiter les œufs de nombre d’espèces différentes d’araignées. On dénombre Gasteracantha cancriformis, Larinioides sclopetarius, Nuctenea sp pour les Araneidae . Mimetus notius pour les Mimetidae . Pityohyphantes costatus pour les Linyphiidae . Et enfin Phidippus audax pour les Salticidae .


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Les endoparasites

L’endoparasite, comme expliqué au début de l’article, est un parasite interne. Celui-ci ne sera pas visible à l’extérieur, pourtant il est rentré par la force à travers les tissus de l’araignée !

Deux cas d’endoparasitisme vont être distingués. Dans les deux cas, la fin est tragique pour l’araignée mais d’un coté il s’agit d’une "mort naturelle" et dans l’autre il s’agit d’un suicide !

Les parasites poussant au suicide sont des vers nématodes ou des vers nématomorphes (nématozoaires). Ces parasites sont capables d’influer sur le comportement de leur hôte en les manipulant. Pour les araignées, les nématodes connus font partie de la famille des Mermithidae (ordre Mermithida, classe Adenophorea, embranchement Nematoda ). Les adultes Mermithidés se reproduisent dans l’eau, pour quitter la terre ferme, ils vont parasiter un hôte et se développer tranquillement à son insu. Lorsque le parasite approchera de la fin de son développement, il va pousser son hôte à se jeter dans l’eau ! L’émergence de l’adulte se fera donc dans l’eau. Il partira alors en recherche d’un partenaire sexuel et se reproduira.

Les vers nématodes peuvent être aussi responsables d’un ralentissement de la réactivité de leur hôte, d’épigyne déformée, de pattes et pédipalpes malformés, de castration...

Au moins trois familles d’araignées sont parasitées par des nématodes : Lycosidae , Sparassidae et Thomisidae . Il y en a probablement beaucoup d’autres. Il y a peu d’études sur ce sujet. Il faut faire face à plusieurs difficultés, tout d’abord, le ver tue son hôte juste au moment de l’émergence, son cycle de vie est très mal connu et ensuite, l’identification jusqu’au genre n’est possible qu’avec des mâles.

Le premier fossile de nématode parasitant une araignée a été trouvé dans de l’ambre de la Baltique. Il est âgé de 40 millions d’années. Le ver a été identifié comme étant Heydenius araneus. Ce dernier a été retrouvé juste à coté d’une araignée de la famille des Thomisidae.

Résumé de la publication en ligne :
George Poinar, Jr. © 2000 - Heydenius araneus n.sp. (Nematoda : Mermithidae), a Parasite of a Fossil Spider, with an Examination of Helminths from Extant Spiders (Arachnida : Araneae), American Microscopical Society.

Nous ne pouvons malheureusement expliquer le mécanisme de la manipulation. Le fait que deux clades différents (Nematoda et Nematomorpha) influencent le comportement de leur hôte de manière similaire est considéré comme une convergence évolutive.

Les endoparasites entraînant une "mort naturelle" sont de l’ordre des diptères (Diptera) et plus particulièrement de la famille des Acroceridae . La larve est exclusivement endoparasite d’araignées. Les Lycosidae et les Agelenidae font partie des familles victimes des Acroceridae.

Cyrtus gibbus
Acroceridae - Cyrtus gibbus

Auteur : Chriscraft

ref : 32583

La larve d’acrocéride est capable de faire des petits bonds afin de rechercher un hôte. Elle est aussi capable de remonter un fil d’araignée par reptation. Le premier stade larvaire est muni d’un petit disque adhésif afin de pouvoir se dresser et s’accrocher plus facilement à une araignée. Une fois qu’elle a trouvé un hôte, elle va pénétrer à l’intérieur. Elle commence par s’accrocher à l’araignée avec ses parties buccales, elle découpe un tout petit trou dans le tégument mais ne pénètre pas encore à l’intérieur. Elle va attendre de muer ! Le deuxième stade larvaire est physiquement différent. Il est plus petit et plus souple. Il va pénétrer par le petit trou qui a servi au stade précédent et laisser son exuvie à l’extérieur.

Cette technique peu commune de pénétration dans l’hôte permet de réduire les dommages corporels et donc de limiter le risques de décès prématuré de l’hôte. Le cycle de développement de la larve peut durer plusieurs années...

Une fois à l’intérieur, la larve va finir par aller se fixer sur la cavité pulmonaire de l’araignée. Lieu où elle se procurera de l’oxygène. Au départ, elle respecte les organes vitaux ce qui garde son hôte en vie. Par contre, lorsqu’elle sera proche de son troisième stade larvaire, elle absorbera très rapidement toutes les substances nutritives que peut lui apporter l’araignée. Cette dernière finira par en mourir... La Larve pratique alors une ouverture pour pouvoir sortir du corps de l’araignée et aller se nymphoser. La nymphose n’aura pas lieu n’importe où ! Elle se fera à l’intérieur du cocon protecteur que l’araignée avait tissé en vue de sa propre mue !

Plusieurs individus peuvent se partager le même hôte.


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Les ectoparasites

C’est certainement le cas le plus connu. De nombreuses études ont été faites sur ce sujet.

Les ectoparasites des araignées sont des Hyménoptères. Beaucoup de familles différentes ont développé des stratégies vraiment étonnantes pour assurer leur descendance. Deux méthodes prédominent pour parasiter l’araignée vivante : soit la laisser en liberté, soit l’enfermer dans un nid.

Les Ichneumonidae utilisent la première méthode. Toutes les espèces ne sont pas inféodées aux araignées mais il est courant d’observer de malheureuses araignées accompagnées d’un locataire indésirable.

L’Ichneumon s’attaque principalement à des orbitèles. Il est étonnant de constater que l’araignée ne résiste que très peu lors de l’approche de la femelle Ichneumon ! Plusieurs auteurs décrivent l’attitude de l’araignée au moment de cette approche : elle se tient coite, docile, immobile pendant quelques minutes après s’être laissée tomber de la toile (John Crompton, 1951). A l’heure actuelle, aucune hypothèse vraiment étayée n’arrive à expliquer ce phénomène. L’Ichneumon profite de ce moment pour caresser l’araignée avec antennes avant de déposer un œuf juste sous le dessous du tégument du dos.

Une fois que le parasite aura émergé, il se fixera au niveau du pédicelle (endroit inaccessible pour l’araignée). Cette larve se nourrira de l’hémolymphe de l’araignée pendant que celle-ci continuera normalement sa vie. Le développement est assez long. Lorsque cette dernière arrivera à proximité de la nymphose, elle tuera son hôte et ira se confectionner un petit "cigare" de feuilles pour faire sa métamorphose. Le parasite « doit » maintenir son hôte en vie le plus longtemps possible ce qui évitera sa décomposition probablement nuisible au développement de la larve.

Tetragnatha sp. parasitée
Auteur : Marina Chavernoz
ref : 17321
Cette photo est issue d’une discussion sur le forum : C’est l’histoire d’un parasite sur le dos d’une araignée...

Beaucoup d’espèces d’ Ichneumonidae sont des ectoparasites. Il serait difficile d’en faire une liste exhaustive. Entre autres, on pourra citer le genre Polysphincta.

Les autres Hyménoptères ont choisi la seconde méthode : capture puis parasitisme.

Commençons par les Sphecidae et plus précisément par le genre Sceliphron . En France au moins trois espèces sont des ectoparasites des araignées : Sceliphron curvatum, Sceliphron spirifex et Sceliphron destillatorium. Il s’agit de guêpes maçonnes assez grandes, assez sveltes dans les teintes noires et jaunes.

Elles construisent des nids de terre composés de plusieurs cellules. Dans chacune des cellules, elles entassent des araignées paralysées et y déposent un seul oeuf. La larve se nourrira des araignées vivantes. Pour capturer ses proies, le Sceliphron se transforme en chasseur. Une fois au contact de l’araignée, il va la piquer à l’aide de son dard pour lui injecter du venin. Celui-ci paralysera l’araignée mais la gardera vivante le temps du développement de la larve.

Beaucoup de familles d’araignées sont victimes de Sceliphron.

Sceliphron curvatum
Sceliphron curvatum
Auteur : Anonyme
ref : 10904

Photo extraite d’une discussion sur le forum : demande d’identification

Sceliphron curvatum
Sceliphron curvatum
Auteur : Inconnu
ref : 2054

Sceliphron curvatum emmenant une araignée.
Cette 2e photo est issue d’une discussion sur le forum : Sceliphron curvatum

Voyons maintenant des Crabronidae  : au moins deux genres sont connus pour parasiter les araignées, à savoir les Miscophus et les Trypoxylon .

Contrairement aux Sceliphron, ces deux genres ne « maçonnent » pas leur nid. Le premier creuse des terriers dans des terrains sablonneux et le second utilise des cavités déjà existantes (des tiges creuses par exemple). Par contre, ils entassent eux aussi des araignées paralysées dans des cellules séparées. Là encore, la femelle ne pondra qu’un seul œuf par cellule. Les familles d’araignées préférées par ces deux genres sont les Theridiidae , les Linyphiidae et les Araneidae .

Trypoxylon sp.
Auteur : Didier Roustide

Le cas le plus connu et le mieux documenté est certainement celui des Pompiles, c’est-à-dire la famille des Pompilidae . Cette famille est très vaste, ses membres sont des guêpes solitaires spécialisées dans la chasse d’araignées pour perpétuer leur espèce. Cette fois encore l’araignée va être capturée, paralysée et entraînée dans le nid du Pompile. Ce dernier déposera alors un œuf sur l’araignée et fermera la cellule. Les cellules peuvent être creusées dans le sol, dans le liège des chênes, en France une seule espèce les maçonne avec de la terre...

Les adultes chassent en été afin que la larve puisse dévorer son araignée avant l’hiver. Si elles sont dérangées au moment de la ponte, elles peuvent aller détruire leurs œufs.

Il existe un grand nombre d’espèces, certaines étant spécialisées sur un genre, d’autres étant plus souples dans le choix des proies.

Deux sous familles peuvent être mises en avant : les Pompilinae et les Pepsinae . Leurs mœurs différent quelque peu.

Les Pompilinae  :

Comme à beaucoup d’autres, Jean-Henri Fabre s’est intéressé à ce sujet. Il a rédigé un récit très vivant de la capture de la Ségestrie (Segestria florentina) par le pompile apical (Pompilus apicalis). Il a également observé le pompile annelé (Calicurgus annulatus) entraînant la « tarentule à ventre noir » (Lycosa narbonensis). Il constatera que cette dernière met sept semaines pour mourir une fois paralysée ! Sept semaines de calvaire...

Jean-Henri Fabre s’aperçoit d’une chose importante : le pompile ne pénètre jamais dans le nid de l’araignée, quelle que soit cette araignée, il l’extrait de force par la ruse ! Pénétrer dans le nid serait probablement trop dangereux pour lui. Par contre, si l’occupante est absente, c’est une autre histoire... La plupart du temps, une fois l’araignée mise à terre, celle-ci change de tempérament. Elle n’est plus aussi agressive et est plutôt craintive. Idéal pour le pompile !

Le comble pour la Ségestrie, c’est que le pompile apical utilise son propre nid pour l’enfermer avec la précieuse ponte.


Pour lire ce récit de Jean-Henri Fabre il faut aller dans sa bibliothèque au rayon "Souvenirs entomologiques, Jean-Henri FABRE, 1882, IIème Série, Chapitre 12" ou bien le visiter en ligne : Les Pompiles - série II chapitre 12

Sans faire une liste exhaustive, quelques genres peuvent être cités.

  • Parmi les chasseurs d’ Araneidae se trouvent les Episyron, les Pompilus. et Batozonellus lacerticida qui se spécialise encore plus puisque qu’il est fervent des Argiope .
  • Les Anoplius sont plutôt attirés par les Lycosidae .
  • Agenioideus apicalis s’en est pris à des Segestria .
  • Un Dipogon a été vu aux prises avec une Salticidae
Heliophanus tribulosus
Heliophanus tribulosus parasité par une larve de Agenioideus cinctellus

Illustration d’une Batozonellus lacerticida (Pompilidae) emportant une Argiope bruennichi

Extrait de cette discussion sur le forum)

Batozonellus lacerticida
Aux prises avec une Argiope.
Auteur : Angélique & Franck Beaupere
Batozonellus lacerticida
Auteur : Angélique & Franck Beaupere
  • les Pepsinae  :

    Le plus spectaculaire est certainement Pepsis heros. Ce dernier est un terrible chasseur de mygales sur le continent sud-américain !

    Plus proche de nous se trouvent les Cryptocheilus. Cryptocheilus alternatus est capable, entre autre, de s’attaquer à la fort grande Lycosa narbonensis !

    Le genre Auplopus est particulièrement remarquable car non seulement il capture et paralyse une araignée mais en plus il lui coupe les pattes (il peut en rester quelques unes). On peut supposer que son venin paralysant n’est pas très efficace ou bien que les pattes de l’araignée le gênent pour le transport et/ou le stockage. La technique est infaillible ! Une fois les pattes découpées, l’Auplopus pourra tranquillement transporter l’araignée en la tenant par les filières. L’Auplopus ne s’est pas spécialisé, il s’attaque aussi bien à des Lycosidae , qu’à des Araneidae ou encore à des Thomisidae .

La technique de l’ Auplopus sp en images :

Photo de Auplopus sp.
Découpage minutieux des membres
Auteur : Franck Buron-Mousseau
ref:13892
Photo de Auplopus sp.
Puis transport jusqu’au nid
Auteur : Lauzias
ref:4461

Les dernier cas d’ectoparasitisme que nous aborderons est quelque peu particulier. Il s’agit des Chrysidoidea plus communément appelées "guêpe-coucou".
La femelle adulte est une cleptoparasite des hyménoptères confectionnant des cellules pour y entasser des vivres (voir plus haut). Elle profite d’une loge déjà faite et déjà approvisionnée pour y déposer un œuf. La larve sera alors ectoparasite de l’animal mis en réserve. Donc d’araignées dans le cas qui nous intéresse !

Didier Roustide a été témoin de ce phénomène :

Une Chryside a découvert le futur nid d’un Trypoxylon, elle profite de l’absence du propriétaire pour pénétrer à l’intérieur en vue de pondre. Mais voila que Madame Trypoxylon revient avec de quoi garnir le nid... La rencontre perturbe nos deux protagonistes ! Le Trypoxylon s’en va rapidement en laissant tomber l’araignée. La Chryside, encore à l’intérieur, se roule en boule et se prend l’araignée sur la tête...

Vous trouverez la discussion autour de ce sujet sur le forum.

Voici les principales photos :

Trichrysis cyanea
Auteur : Didier Roustide
Trypoxylon sp.
Auteur : Didier Roustide
Vue interieure de la cavité
Auteur : Didier Roustide

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Les cleptoparasites et les parasites commensaux

Avez-vous déjà observé des petites mouches semblant prendre des risques insensés auprès d’une araignée ? Eh bien, en fait, il ne s’agit pas du tout de la future proie mais plutôt d’une petite voleuse !

Trois familles de Diptères sont connues comme étant des cleptoparasites des araignées : les Cecidomyiidae (Didactylomyia longimana parasite des araignées telles que Nephila clavipes, Argiope aurantia, Mastophora bisaccata et Eriophora ravilla ( Araneidae )) , les Chloropidae et les Milichiidae (les genres Desmometopa, Phyllomyza et Neophyllomyza sont les principaux cleptoparasites de cette dernière famille). Elles ne mesurent pas plus que quelques millimètres et elles se nourissent en suçant la victime de l’araignée à l’endroit même où celle-ci se nourrit.

Des Thomisidae , des Araneidae , des Tetragnathidae et des Philodromidae ont été observées accompagnées de ces petites mouches. Probablement toutes les familles d’araignées en sont victimes.

La Thomise Misumena vatia tente de repousser ces petites mouches en donnant des coups de pattes vers celles qui s’approchent et en oscillant pour essayer de déloger celles qui sont déjà sur sa proie. Cette notion de défense montre bien que ces petites mouches sont des cleptoparasites et non des parasites commensaux.

Ces mouches sont probablement attirées par les produits volatiles de la digestion externe de l’araignée, en effet elles approchent toujours dans le vent et tentent souvent de se poser directement sur les parties buccales de l’araignée.

Desmometopa sp., de la famille des Milichiidae, s’attaquant à la proie d’une Araneus diadematus :

Desmometopa sp.
Desmometopa sp. avec une Araneus diadematus
Desmometopa sp.
Desmometopa sp
Auteur : Dimitri Geystor
ref:7009 - ref:7010
Ces photos sont extraites d’une discussion sur le forum : kleptoparasite.

Chose étonnante, Didactylomyia longimana a déjà été vue sur des toiles géométriques sans rester collée ! Peut-être est-elle capable de passer entre les gouttes de colle...

Néanmoins, il arrive tout de même que ces voleuses se fassent attraper !

Dans la rubrique des cleptoparasites, il ne faut absolument pas négliger les autres araignées. Certaines sont opportunistes (juvéniles de Nuctenea umbratica ( Araneidae ) prélevant les petites proies sur la toile de maman), mais d’autres, sont spécialisées. C’est le cas d’un genre appartenant à la famille des Theridiidae  : Argyrodes.

Les Argyrodes passent leur vie sur la toile d’autres araignées. Elles se nourrissent en prélevant les proies qui se prennent dans la toile. Elles poussent même le vice jusqu’à pondre leurs œufs sur cette toile.

En France, les Araneidae telles que Cyrtophora citricola, Argiope bruennichi, Argiope lobata, Larinioides folium, ... sont victimes de l’Argyrodes argyrodes. On peut également rajouter la Theridiidae Latrodectus tredecimguttatus, le Pholcidae Holocnemus pluchei, l’ Agelenidae Agelena labyrinthica... Le nombre d’espèces est certainement bien plus important que cela...

Ces Araignées ne causent néanmoins pas de gros dégâts à leur hôte. Elles ne font que prélever une partie de la nourriture. Argyrodes argyrodes serait incapable d’attraper sa nourriture elle-même et aurait des préférences nécrophages.

Nuctenea umbratica
Nuctenea umbratica
Juvénile ayant prélevé une proie sur la toile de sa mère
Photo extraite d’une discussion sur le forum : Chapardeuse.
Argyrodes argyrodes
Argyrodes argyrodes sur la toile d’une Araneus sp.
Argyrodes argyrodes
Argyrodes argyrodes

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Auteur : Jean Louis Besson
ref:35780 - ref:34565
Ces photos sont extraites d’une discussion sur le forum : Araignées en triangle.

A consulter également : De petites araignées parasites.

On a observé des acariens parasitant des araignées. Ces acariens sont peu étudiés et leur rôle exact n’est pas bien défini.

Photo de Tetragnatha sp. parasitée
Tetragnatha sp
Parasitée par des acariens
Auteur : Guillaume Jacquemin
ref:11346
Photo extraite d’une discussion sur le forum : Araignée parasitée.
Photo d'Ephebopus rufescens parasitée
Ephebopus rufescens
Parasitée par des acariens
Auteur : Lionel Dabat
Photo extraite d’une discussion sur le forum du GEA : Parasites : Acariens.

Comme il a été dit en préambule, ce travail est une synthèse. Le sujet est vaste et nos connaissances se compléteront d’année en année en fonction des nouvelles études. La description des mœurs des différents types / familles / espèces... montre bien que l’évolution a abouti à des comportements complexes de la part du parasite.

Au moindre mouvement de travers, les rôles peuvent s’inverser et le parasite devenir la proie. Ces mécanismes de parasitisme sont très variés et ne se mettent en place qu’in natura. C’est un vrai challenge pour un scientifique de les étudier mais c’est également une véritable opportunité.

Qui nous apportera la solution au mystère de la manipulation comportementale induite par les vers ? Qui nous en dira plus sur le rôle des acariens observés sur certaines araignées ? Si l’un de vous aujourd’hui, demain ou dans 10 ans a des éléments de réponses, qu’il les partage avec nous !


La plupart des informations proviennent de sources Internet fiables. L’article ayant été long à rédiger certaines adresses ne fonctionnent plus. Voici celles qui fonctionnent encore et qui n’ont pas déjà été citées dans le texte :

Et bien évidemment, le forum du monde des insectes !

Autres références :

  • John Crompton, L’araignée, Correa, 1951
  • Redborg KE., Biology of the Mantispidae., Annu Rev Entomol. 1998 ;43:175-94
  • Hank Guarisco, Description of the egg sac of Mimetus notius
    (Araneae, Mimetidae) and a case of egg predation
    by Phalacrotophora epeira (Diptera, Phoridae), 2001. The Journal of Arachnology 29:267–269 (disponible en ligne)
  • B. Overgaard Nielsen, P. Funch and S. Toft, Self-Injection of a Dipteran Parasitoid into a Spider, Naturwissenschaften, Volume 86, Number 11 / novembre 1999 (disponible en ligne)
  • R. N. Prakash and T. J. Pandian, Energy flow from spider eggs through dipteran parasite and hymenopteran hyperparasite populations , Oecologia, Volume 33, Number 2 / janvier 1978 (disponible en ligne)
  • Jean-Henri FABRE, 1882, Souvenirs entomologiques.
Merci à Cécile B., Lionel Dabat, Jean Jacques Decerf, Didier Roustide, Arno Szwab et aux autres pour l’aide qu’ils m’ont apportée.

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